quoy les
Turcqs ne peussent en
aucune maniere trouver ung
nouveau chemin ne en faire.
Et s’en vint sur ung certain
pas la ou il bien savoit qu’il
leur convenoit
passer pour en
trer en
Honguerie, lequel conte
de Lazara
conduisi et mena en
ce pas avecques lui bien X
M Hou
gers et bien X
M arbalestriers
qu’il mist sur les deux esles des
chemins et des pas et II
M hom
mes tenans
haches en leurs
mains et grosses cuigniés pour
copper les bois et clore les passai
ges
et chemins quant temps
seroit.
Quant tout fut fait, il
dit a ceulx qui avecques
lui es
toient : "Sans faulte, seigneurs,
Lamorath Bacquin viendra
puis
qu’il le mande.
Or soyéz tous
preudhommes et aidiéz a garder
ce
passaige.
Car se les
Turcqs le
concquierent, toutte
Honguerie est en grant peril. Nous sommes
en fort lieu, ung de
nous en doit
valloir quattre.
Encores vault
mieulx morir a
honneur en gar
dant nostre heritaige et la foy de
Jhesu Crist que vivre
en honte et
en servage dessoubz ces chiens
mescreans.
Combien certes que
Lamorath Bacquin soit moult
vaillant et preudhomme en sa
loy."
Tous respondirent : "Sire, il
nous en failt attendre l’adven
ture et voulons vivre et morir
avecq vous. Viengnent les
Turcqs s’ilz veulent, nous sommes prestz
a les recevoir."
Et de touttes ces
ordonnances et garde de passai
ge ne savoient riens les
Turcqs.
Car le conte de Lazara pour doub
te des espies et que leur
ordonnan
ce ne feust revellee et sceu par
Lamorath Bacquin, avoit mis
cer
taines gens sur les passaiges es
quelles gens il se confioit autant
comme en lui
mesmes qui bien
gardoient de jour et de nuyt que
nul ne alloit ne venoit devers
les
Turcqs.
SHF 3-63 sync
Lamorath Bacquin ne mist
point en oubli son emprin
se. Mais dit qu’il envoyeroit vi
siter la terre au conte de
Lazara
a son grant dommaige. Car il
ne vouloit pas qu’il feust trouvé
ne
reprouvé menteur de ce qu’il
avoit promis. Il print environ
LX
M
hommes des siens.
Car il
en avoit bien deux cent mille
sur les
champs et leur bailla de
cappitaines quatre, assavoir le
duc Mansion de Mecque, la gar
de de Damiette, Alphalori de Sal
marra et le
prince d’Escordes, filz
a l’Amistant de Cordes, qui s’apel
loit Brachin, et leur dit
ainsi au
departir : "Alléz a tout voz gens
que je vous ay delivréz.
C’est
as
séz pour ouvrir le passaige de
Hon
guerie et entréz en la terre du
conte de Lazara et la destruiséz
toutte.
Et si tost que je sauray
que vous y seréz logiéz, je vous
viendray veoir a tout le demou
rant de mon peuple. Je
veul
toutte
Honguerie mettre en ma
subjection et puis le
royaulme
d’Alemaigne, il m’est destiné com
me dient les sors de mon paÿs
et les divins
d’
Egipte que doy
estre roy et sire de tout le monde.
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