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et la passerons nous l’arriviere
a nostre aise et entrerons en Flandres
et oultre tout au long du païs ou
que les Flamens soient ou devant
Yppre ou ailleurs, ilz sont bien si
orgueilleux et si oultrecuidiéz que
ilz venrront contre nous." A ce pro
pos du connestable s’accordoient tous
les mareschaulx et demourerent
en cel estat celle nuit jusques au
lendemain que le sire de Lebreth, le
sire de Coucy, monseigneur Aymenions
de Pommiers, monseigneur Jehan de Vi
enne, admiral de France, monseigneur
Guillaume de Poitiers, bastard de Lan
gres, le Begues de Villaines, monseigneur
Raoul de Coucy, le conte de Conversant,
le visconte d’Assy, monseigneur Raoul de
Rayneval, le sire de Sempy, monseigneur
Guillaume des Bordes, le sire de Sully,
monseigneur Olivier du Guesclin, monseigneur
Morice de Tresguidi, monseigneur Gui le
Baveux, monseigneur Nicole Painel et les
deux mareschaulx de France, monseigneur
Loÿs de Sancerre et le Monton, seigneur
de Blainville, et les deux mareschaux
de Bourgongne et de Flandres, monseigneur
Enguarran d’Eudin, monseigneur Olivier
de Mauny, monseigneur Hervieu de Mau
ny, son frere, seigneur de Thorigny,
monseigneur Eustace de la Houssaye, monseigneur
Robert de Guitey et pluseurs autres
vindrent en la chambre du conne
stable de France pour avoir certain
avis et arrest comment on se ordon
neroit. Et se on passeroit parmy
Lisle pour aler a Commines et a War
neston
, ou les pas estoient gardéz,
ou se on yroit amont vers la Gorge,
le Vautre et Saint Venant et la pas
ser la riviere du Lis. La eut entre ces
seigneurs pluseurs oppinions et
pluseurs paroles soustenues et re
tournees. Et disoient ceuls qui bien

cognoisoient le païs : "Certes, ou
temps de maintenant il ne fait nul
aler en ce païs de Claremban, ne
en la terre de Baillouel, ne aussi en
la chastellerie de Cassel, de Furnes
ne de Bergues." "Et quel chemin
tendrons nous donc ?" dist le conne
stable. La dist monseigneur de Coucy une
moult haulte paroule : "De mon ad
vis", dist il, " je conseilleroie que nous
aleissions a Tournay la passer
l’Escaut et cheminer devant Au
denarde
, ce chemin la ferons nous
bien a nostre aise et la combatrons
nos ennemis car nous n’arons la
nul empeschement a l’Escaut passer
a Tournay. Si venrrons devant
Audenarde et serons droittement
ou logeïz de Philippe d’Artevelle.
Et si serons tous les jours ra
freschiz de toutes pourveances qui
nous venrront du costé de Henault
et qui nous suivront de Tournay
parmi la riviere." Ceste paroule
ditte du seigneur de Coucy fut
bien entendue et voulentiers oïe
et des aucuns longuement souste
nue. Mais le connestable de France
et le mareschal de Sancerre s’encli
noient trop plus a aler toudis de
vant eulx pour querir et faire un
bref passaige a leur loial pouoir
que d’aler a destre et puis venir a se
nestre querir le plus lointaing
chemin et y mettoient pluseurs
raisons raisonnables. Car ilz di
soient : "Se nous querons autres chemins
que le droit, nous ne monstrerons
pas que nous soions droittement
gens d’armes. A tout le moins se
nous ne faisons nostre devoir d’a
ler taster, se aucunement a ce pas
de Commines, qui est gardé, ou au
dessus ou au dessoubz nous pourrons pb 132 v