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gne et a madame sa femme et a ma
dame leur fille, contesse de Nevers
,
et a tous les seigneurs. Et puis se
departirent de Tournay et retour
nerent a Gand. Ces grans sei
gneurs et dames se departirent
aussi et s’en retournerent chas
cun et chascune en leurs lieux.
Le duc de Bourgongne et la duches
se vindrent a Lisle et de la a Arraz
et y firent leur feste de Nouel. Et
quant Pietre du Bois vit que c’estoit
tout a certes que la paix estoit fai
tte et fermee par les moiens dessus
diz et que toutes gens en Gand en
avoient moult grant joie, et ne
se tailloit point que par ceste or
donnance par nulle incidence
aucune guerre renouvelast, si
fut tout esbahy et ot pluseurs y
maginacions a savoir se il demour
roit a Gand avecques les autres
car bien faire le pouoit se il vou
loit car tout estoit pardonné par
la teneur et seellé du duc de Bour
gongne
et les seigneurs dessus
nomméz, ne on n’en devoit pour
guerre ne dissencion qui eust esté,
jamais faire ne monstrer nul
semblant. Mais quant il avoit
bien examiné son couraige, son
cuer ne s’i adonnoit nullement
qu’il y demourast, tant pour les
proïsmes et amis du seigneur
de Harcelee, dont il avoit maisement
consenti la mort, quoyque François
Acremen
en fust encoulpéz, que
pour les mors aussi de sire Simon
Bette
et de Sigisebrest Gente et de
pluseurs autres qu’ilz avoientt la
guerre durant fait maisement
occire et decoler en sa presence. Si en

ot collacion a François Acremen
et lui demanda : "Quelle en est vostre en
tente? Demourréz vous en ceste ville
de Gand
?" "Ouil, par ma foy," respondi
François, "monseigneur de Bour
gongne
le veult. Et vous sçavéz
aussi que par les poins et articles
de la paix tout est pardonné." "Ha!
François, François," dist Pietre du
Bois
, "vous ne l’entendéz pas bien.
Je croy asséz que monseigneur
de Bourgongne
ne veult que bien
et loiauté et tous les officiers de
Flandres, mais il y a de grans
haines couvers dedans Gand sur
nous, qui se descouvreront tempre
ment. Et se ci nous demourons,
je fais grant doubte que nous ne
comparons moult chierement
les mors du seigneur de Harcelee,
de Symon Bette et de Gisibrest Gen
te
et de pluseurs autres que nous
avons fait occire. Comment sça
uréz vous aler seul et vous souliéz
estre acompaignié d’un cent ou
deux cens hommes tous arméz
et en vostre commandement ? Comment
sçauréz vous estre varlet de ceuls
dont vous avéz esté maistres ? Ceuls
qui vous souloient encliner et saluer
vous eschiveront et finiront d’autre
par et nul compte de vous ne ten
dront. Saichiéz que je considere
bien tous ces estas et se vous m’en
croiéz, vous en venrréz en Angle
terre
avecques moy, car briefment
je partiray de la ville de Gand
quant monseigneur Jehan de Boursiers
et les Anglois partiront. Or en
faittes ce que vous vouldréz car
vous en estes a chois, ou du partir
ou du demourer." Adonc respondit pb 226 v