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par ses assemblees. Je feray tellement gar
der les passaiges et les entrees de Flan
dres
que il ne sara mie en leur puis
sance qu’ilz se voient en ceste annee deça
la riviere du Lis." Adont manda il a
Gand le seigneur de Harzelles que il
venist devant Audenarde. Il vint. Quant
il fut venuz, Phelippe lui dist: "Sire de Harzel
les, vous sçavéz bien et entendéz tous les
jours comment le roy de France se appa
reille tous les jours pour nous destrui
re. Il fault que nous aions conseil sur ce.
Vous demourrés cy et je m’en yray a
Bruges et apprendray encores mieulx
des nouvelles, et encourageray les
bonnes gens des bonnes villes, et esta
bliray sus la riviere du Lis tant de gens
aux passaiges que les Françoys ne pour
ront oultre." A tout ce s’accorda bien le sire
de Harzelles. Lors se departy Phelippe du siege
et s’achemina vers Bruges et chevauchoit
comme sires et faisoit porter son pennon
devant luy tout desveloppé armoyé de
ses armes, et portoit l’escu de noir a
trois chappeaulx d’argent. Quant il
fut venuz a Bruges, il trouva Pietre du
Boys
et Pietre le Mutre, qui estoyent
gardiens et cappitaines de Bruges. Si
parla a eulx et leur remonstra com
ment le roy de France a toute sa puis
sance vouloit venir en Flandres et que
il convenoit aler au devant pour y
remedier et garder les passaiges.
"Sy vueil, Pietre du Boys, que vous ailléz
au pas de Commines. Vous garderés
la la riviere. Et vous Pietre le Mutre
vous yrés au pont de Warnescon et
la garderés vous le passaige. Et faittes
tous les pons en dessus la riviere
jusques a la Gorge et a Escelles et a
Menreville rompre, et au dessoubz

jusques a Courtray. Par ainsi ne pourront
les Françoys passer, et je m’en yray a Yp
pre
parler a eulx et eulx en amour ra
freschir, conforter et remonstrer comment
nous sommes conjoins ensemble par une
unité et que nulz ne se forvoye ne ysse de ce
que nous avons juré a tenir. Il n’est mie en
la puissance du roy de France ne de ces Fran
çoys qu’ilz puissent passer la riviere du
Lis
ne entrer en Flandres, puisque les pas
soient gardé, se ilz ne vont au long de la
riviere querre passaige." Ce respondirent
ces deux Pietre: "Phelippe, vous dittes bien, et
nous ferons ce que vous dittes. Et de noz
gens qui sont en Angleterre, avéz vous
ouy nulles nouvelles?" "Par ma foy !" respon
di Phelippe, "nennil, dont je m’esmerveille. Les
parlemens sont maintenant a Londres, et
en devrions temprement ouyr nouvelles.
Le roy de France ne se puet jamaiz tant
haster que nous ne soyons confortés des An
gloys
, ainçoys qu’il nous porte point de con
traire. Espoir, fait le roy d’Angleterre son man
dement et venront Angloys sus une nuit
quant nous ne nous en donrons de garde."
Ainsi se devisoient ces III compaignons
ensemble. Auques pour ce temps toute Flan
dres
estoit en obeyssance a eulx excepté
Tenremonde et Audenarde.
SHF 2-311 sync Entrementes que ces ordonnances s
e faysoyent et que le roy de France se
journoit en Arras et que gens d’armes
s’amassoyent en Artoys, en Tournesis et
en la chastellerie de Lysle et la environ,
sy advisierent aucuns chevaliers et escuiers
qui sejournoyent a Lisle et la environ
par l’emprinse et ennort du Halze de Flandres,
que ilz feroyent aucun exploit d’armes, par
quoy ilz seroyent renomméz. Sy se cueilli
rent un jour environ six vins hommes
d’armes, chevaliers et escuiers, et vindrent passer pb 119 v