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tous les articles et poins dessusdiz qui
sont tous veritables, car je, aucteur, en
ay esté souffisamment informéz par
les nobles du royaume de Portingal,
ce sont bien choses a esmerveillier de
prendre et faire un bastart roy332, mais
ilz n’y trouvoient nul plus prochain,
et disoient li Portingalois — et encores
dient — que la royne de Castille madame
Bietris, fille a madame Alienor de Co
gne
, est bastarde et plus que bastarde
par les condicions dessusdictes, ne que ja
ne sera royne de Portingal, ne hoir qui
descende de li. Et ceste opinion mist bien
avant le conte de Fois a ses gens quant
il les ot mandéz a Ortais, et il leur
donna a disner et ilz prindrent con
gié a lui, car de toutes ces besoignes
de Portingal et de Castille il estoit sou
fisamment enfourméz, et leur avoit
dit: "Seigneurs, demouréz. Vous ne vous
avéz que faire d’embesoignier de la guer
re de Castille et de Portingal, car sa
chiéz pour verité que le roy de Portin
gal
ne la royne de Castille qui fu fille
du roy Ferrant de Portingal
n’ont nul
droit a la couronne de Portingal, et
est une guerre commencie par estourdie et
ennemie chose, si vous en pourroit
bien mesavenir, et ceulx qui s’en embe
soigneront." Ses gens avoient respondu
que puisqu’ilz avoient receu et prins
l’argent d’un autel seigneur comme le
roy Jehan de Castille, ilz l’iroient servir et
desservir. Le conte de Fois les laissa a
tant ester, mais tout ou partie y de
mourerent, si comme vous avéz dessus oy.
SHF 3-72 sync Or retournons aux besoignes de Por
tingal
, car elles ne font pas a laissier,
pour les grans faiz d’armes et entre
prinses qui en sont issues, et pour his
torier et croniquier toutes choses adve

nues, afin que ou temps a avenir on
les treuve escriptes et enregistrees,
car se elles mouroient ce seroit dom
mage. Et par les clercs qui ancienne
ment ont escript et enregistré les his
toires et les livres sont les choses sceu
es, car il n’est si grant ne si beau me
moire comme c’est d’escripture. Et veri
tablement je vous di, et vueil bien que
ceulx qui vendront aprés moy sachent,
que pour savoir la verité de ceste his
toire et enquerre justement de tout,
en mon temps j’en os beaucoup de
paine et cerchay moult de paÿs et de
royaumes pour le savoir, et en mon
temps congneu moult de vaillans
hommes et vi en ma presence, tant
de France comme d’Angleterre, d’Escoce,
de Castille et de Portingal et des au
tres terres, duchiéz et contéz qui se sont
conjoint, eulx et leurs gens, en ces guer
res, auxquelz j’en parlay et par lesquelz
je m’enfourmay, et volentiers ne aucu
nement je n’eusse point passé une en
queste faite, de quelque païs que ce
feust, sans ce que je eusse depuis l’en
queste faite bien sceu que elle eust esté
veritable et notable. Et pour tant que,
quant je fu en Berne devers le gentil
conte Gaston de Fois
, je fu enfourméz
de pluseurs besoignes, lesquelles es
toient advenues entre Castille et Por
tingal
, et je fu retournéz ou paÿs
de ma nacion en la conté de Haynault
et en la ville de Valenciennes, et je
m’y fu rafreschi un terme, et ma plaisan
ce me prinst a ouvrer et a poursuivir
l’istoire que je avoie commencie, je me
advisay par ymaginacion que justement
ne le pouoie pas faire par avoir sin
gulierement les parties de ceulx qui
tiennent et soustiennent l’oppinion pb 260 r