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le bourch anglés, le bourch de Carlac, Olin
barbe
, Apton Sechin, Bernandon des Ysles;
et encores y estoit un grant pillart de
Berne qui s’appelloit le sire de Laneplane.
Par cestui et par le bourch de Copane sceuz
je, et fuz infourméz de toute la besoingne.
Ceste emprinse fut faitte aprés la chan
delleur ainsi que huit jours, que les nuiz
sont encores longues et froides. Et vous
dy que toute celle nuit il pleut et venta
et fist un trop lait temps, pourquoy le cap
pitaine du guait de Montferrant n’yssi
oncques hors celle nuit de son hostel,
mais y envoya son filz, un jeu enffant de
XVI, lequel, quant il vint sus un guait
entre l’une porte et l’autre, il trouva qua
tre povres hommes qui veilloient et en
gelloyent de froit. "Prens de chascun de nous
un blanc et nous en laysse aler chauffer
et dormir; il sera tantost unze heures." L’enf
fant convoitta l’argent et le prinst, et ceulx
se departirent de leur guait et retourne
rent en leurs maysons. Geronnet et les
siens estoient tousjours en aguait a l’uis
de l’ostel de la Couronne pour sçavoir quant
le guait retourneroit. Ilz virent le valle
ton revenir, et ceulx aussi qui estoient
partiz de leur guait. Si distrent: "La chose
est bien. Il fait huy une droitte nuit pour
nous; il n’y a si hardy en la ville qui ne s’en
voyse couschier. Le guait est passéz, nous
n’avons meshuy garde de cela." SHF 3-246 sync D’autre
part, Perrot de Berne et les siens chevau
choyent quanqu’ilz pouoient, et les cou
venoit passer asséz pres de Cleremont
et joingnant des fosséz et des murs.
Aussi que a une lieue de Cleremont ilz en
contrerent Aymerigot Marcel et bien
cent lances, lequel estoit cappitaine de
la garnison d’Aloise deléz Saint Flour. Quant

ilz se furent ravisiéz et congneu, ilz se
firent grant chiere et demanderent
l’un a l’autre ou ilz alloient par tel
temps, ne quelle chose ilz queroient.
Respondi Aymerigot Marcel: "Je viens
de mon fort d’Aloize et m’en voiz vers
Calart." "En nom Dieu", respondirent
les deux cappitaines qui la estoient,
le bourc angléz et le bourc de Copane,
"Veéz nous cy. Se vous avéz rien a parler
a nous, si le nous dittes." "Ouyl", dist il,
"vous avéz aucuns prisonniers de la
terre au conte daulphin d’Auvergne,
et vous sçavéz que nous sommes en
traittié ensemble par le moyen du
conte d’Armignach, et si vouldrions
bien ses prisonniers changier a au
cuns autres que je ay en ma gar
nison, car j’en suis trop fort requis
de la contesse daulphine qui est une
tresbonne dame, et pourquoy on doit
moult faire." "Marie!" respondi le bourch
de Copane
, "Aimerigot, vous estes bien
tenuz que vous faciéz aucune chose pour
la dame, car vous eustes encores, n’a
pas trois ans, cinq mille frans de son
argent pour le rachat du chastel de
Merquel. Et ou est le conte daulphin
pour le present?" Respondy Aymerigot:
"On m’a dit que il est en France, sus l’estat
que vous sçavéz, de traittiéz que nous
avons au conte d’Armignach et au
conte daulphin." Adonc dist Perrot
Bernois
: "Aymerigot, laissiéz ces parol
les et si venéz avecques nous, sy ferés
vostre prouffit, car vous partirés a nostre
bustin." "Et ou aléz vous?" dist Aymerigot.
"Par ma foy, compaing", respondy Perrot,
"nous en alons tout droit a Montfer
rant
, car la ville me doit huy estre rendue." pb 394 r