Online Froissart
Facsimile mode    Settings    Browse  |  Collate      
pb 167 v

envoyéz tellement que pour resister contre la puissance du duc, la ville vous demourra, ou sinon ilz se sont oubligiéz et en ont livréz hostaiges, que ilz le rendront. Siques, tres redoubté roy, il vous en plaise a donner response quel chose vous en feréz." Le roy respondy et dist: "Nous nous en conseillerons, et puis seréz respondus." Adont se parti le roy de leur presence, et rentra en sa chambre. Je ne say s’il se conseilla ou non, ne comment la besoingna se porta, mais ces six hommes furent la VIII jours que oncques ne furent respondus, ne depuis ilz ne veirent point le roy. Or esperoient le jour que la ville se devoit rendre et point n’estoient encoires retourné leurs six hommes. ¶ Le duc de Lancastre envoya son mareschal au Xe jour parler a ceulx de Besances et dire que ilz se rendesissent ou il leur feroit a leurs ostaigiers trenchier les testes. Le mareschal vint a Besances jusques aux barrieres et fist la venir parler les hommes de la ville a luy; ilz y vindrent. Quant ilz furent venus, il leur dist: "Entendéz entre vous, bons hommes de la ville de Besances. Monseigneur m’envoye devers vous, et vous fait demander pourquoy vous n’apportéz les clefz de ceste ville en son logeiz et vous mettéz en sa obeïssance,

ainsi que faire devéz, car les IX jours sont accomplis des yer et bien le savéz. Se ne vous le faictes, il fera trenchier les testes a voz hostagiers et puis vous vendra assaillir et prendre par force, et seréz tous occhiz sans merchy, ainsi que furent ceulx de Ribadane." ¶ Quant les hommes de Besances entendirent ces nouvelles, si se doubterent aussy de perdre leurs amis qui estoient en ostagerye devers le duc; si disoient: "En bonne verité, mareschal, monseigneur de Lancastre a cause de dire ce que vous dittes, mais nous n’oons nulles nouvelles de noz gens qui nous avons pour celle cause envoiees devers le roy au Val d’Olif, ne quel chose ilz sont devenus." ¶ "Signeurs," dist li mareschal, "espoir sont ilz retenuz pour les nouvelles qu’ilz ont la apportees, qui ne sont pas, ne ont esté trop plaisant au roy de Castille. Et monseigneur ne vuelt pas plus attendre. Pour tant, aviséz vous, car moy fait vostre response, il est ordonné que vous arréz l’assault." Dont reprirent ilz la parolle et disrent: "Sire, or nous laissiéz assambler toutte la ville, et nous parlerons ensamble." "Je le vueil", dist il. Lors rentrerent ilz en Besances, et firent sonner de rue en rue les trompettes pour assambler touttes gens et venir en la place. pb 168 r